Fabriqué en France: cinq questions à Eric Plat, PDG d'Atol les Opticiens

Le 05 Janvier 2024

Le Fabriqué en France est dans l’ADN d’Atol depuis longtemps avec, dès 2005, une relocalisation de la production de certaines gammes de montures. Eric Plat, son PDG revient, pour nous, sur l’implication du groupement sur ce sujet et livre ses solutions pour développer la production lunetière hexagonale.

eric plat remanie site

La revue des opticiens (LRDO) : Pourquoi avoir, à l’époque, fait cette démarche, à contrecourant de beaucoup d’autres entreprises ?
Eric Plat (EP) : A ce moment-là, nous souhaitions sortir une collection avec des branches interchangeables, ce qui nécessitait le dépôt d’un brevet. Nous avons donc décidé de fabriquer cette gamme en France. Ensuite, l’impératif climatique s’est imposé naturellement avec, notamment, la question de l’empreinte carbone. Une lunette fabriquée en Chine a une empreinte carbone 9000 fois supérieure à son équivalent fabriqué en France ! Bien sûr, le coût de fabrication peut être un frein. C’est là qu’intervient la notion de design-to-cost : nous développons nos produits en tenant compte des contraintes financières du marché. Et ça marche, puisque nos collections fabriquées en France rencontrent un franc succès.

LRDO : Vous avez participé au salon MIF en novembre dernier. Comment cela s’est-il passé ?
EP : Très bien. C’est un évènement toujours intéressant et, cette année, grâce à notre partenariat avec Novacel et Opal nous avons pu proposer des équipements complets qui ont beaucoup plu aux visiteurs. Cela nous a permis de montrer que les acteurs de l’optique sont impliqués dans le « bien consommer français ».

LRDO : Le Fabriqué en France est-il un « plus » en magasin ?
EP : Plus ou moins. En réalité, seuls 50% des clients y sont sensibles et sont prêts à payer les produits hexagonaux 5 à 10% plus chers. Les Français sont sensibilisés au Made in France mais le transcrire en acte d’achat est encore difficile. Malgré tout, nous sommes vraiment militants sur ce sujet, qui nous semble important, même si les règlementations en vigueur ont tendance à complexifier les choses et à aller, parfois, à l’encontre du Made in France.

LRDO : C’est-à-dire ?
EP : La règlementation européenne sur la traçabilité ou le 100% Santé sont des exemples parfaits de mesures contre-productives. Pour la traçabilité, l’idée de base est bonne, mais sa mise en place nécessite beaucoup d’administratif, et donc d’emplois dédiés. Cela augmente les coûts de fabrication et rend donc plus difficile la construction d’usines en France. Quant au 100% Santé, les prix fixés ne soutiennent pas du tout le Fabriqué en France. D’ailleurs, nos ventes de produits français représentent aujourd’hui 60% de notre CA contre 80% auparavant, à cause du 100% Santé.

LRDO : Quelles solutions préconisez-vous ?

EP : Tout d’abord une simplification des démarches et normes pour les entreprises. J’ai ainsi répondu à la consultation nationale mise en place par le ministère de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté Industrielle. Si vous prenez l’exemple des produits Origine France Garantie, la notion de traçabilité est nécessaire à l’obtention du label, mais cela ne suffit pas ! Il faut, en plus, suivre les règles de traçabilité avec la base de données Eudamed. Cette double manoeuvre augmente forcément les coûts. Je souhaite également la suppression de la TVA sur les produits OFG. Pour relancer l’industrie lunetière française, il faut, certes, des compétences techniques, du design, des griffes, mais aussi de gros volumes de production. La suppression de la TVA serait largement compensée par la relocalisation d’usines et les créations d’emplois.