Les congés payés ou comment bien s'organiser dès le début de l'année

Le 31 Mars 2023

Afin de s’assurer une continuité de l’activité la plus sereine possible et d’éviter parfois des frustrations, voire des conflits avec les salariés, les employeurs doivent en effet anticiper la gestion des congés payés dès le début de l’année civile.

Par Hervé Benchetrit, Avocat Associé et Léonor Gautier-Peronnet, Avocate à la cour.
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A peine les fêtes de fin d’année terminées, employeurs et employés se penchent souvent rapidement sur le sujet de l'organisation des départs en congés payés. À tout le moins, il est vivement conseillé aux employeurs qui n’y auraient pas pensé de se concentrer rapidement sur ce sujet d’importance, pour une bonne administration de l’entreprise.
Pour rappel, tout salarié dispose de 5 semaines de congés payés pour une année complète, soit 2,5 jours ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur. La convention collective de l’optique-lunetterie n’offre ainsi pas davantage de droits aux salariés que ce que prévoit la loi.
Les développements synthétiques qui suivent ont vocation à répondre aux questions les plus fréquentes qui peuvent se poser sur ce thème récurrent de la vie de l’entreprise.

1- Prise annuelle des conges payés : une obligation pour l’employeur… et pour le salarié

Chaque année, l’employeur a l’obligation de s’assurer de la prise effective des congés de ses salariés en lui maintenant sa rémunération.
Le salarié a quant à lui l’obligation de prendre ses congés : il ne peut y renoncer au profit d’une indemnité compensatrice, ni les utiliser pour exercer une autre activité professionnelle.
Aussi, au 31 mai de chaque année, les congés acquis au titre de la période précédente (du 1er juin N-2 au 31 mai N-1) doivent être soldés et le compteur des salariés se trouver à 0.
Les congés acquis au titre de la période précédente (du 1er juin 2021 au 31 mai 2022) doivent donc être soldés d’ici le 31 mai 2023

2- Employeur ou salarié : qui détermine les dates de départ en congés ?

Contrairement à une idée répandue, c’est à l’employeur de fixer les dates de départ en congés des salariés au titre de son pouvoir de direction.
Autrement dit, le salarié ne peut pas, en principe, imposer ses dates de vacances.
En pratique, il est d’usage que le salarié présente ses souhaits que l’employeur tente de satisfaire en fonction de l’organisation de l’entreprise.
Si l'employeur ne prend aucune décision en matière d’organisation des congés, il ne peut pas refuser au salarié ses demandes de congés.
Attention, le non-respect par l'employeur de ses obligations n'autorise pas le salarié à partir en vacances sans l'en informer au préalable, sous peine de se trouver en absence injustifiée.

3- Comment fixer le calendrier en pratique ?

Le Code du travail impose deux obligations à l’employeur :

  • Informer les salariés de la période de prise du congé principal avant le 1er mars.

Chaque année, l’employeur doit informer les salariés de la période de prise du « congé principal » avant le 1er mars.
Pour les opticiens, cette période s’étend du 1er mai au 31 octobre.
Au sein de cette période, tous les salariés doivent ainsi bénéficier de leur « congé principal », qui ne peut être inférieur à 12 jours ouvrables continus (2 semaines) et ne peut excéder 24 jours ouvrables continus (4 semaines).
Ils disposent en outre d’une cinquième semaine de congés à poser sur l’année, étant précisé qu’elle ne peut être accolée au congé principal.

  • Informer chaque salarié de ses dates de congés au plus tard un mois avant son départ

L’employeur est libre d’imposer au salarié ses dates de congés payés, même si, en pratique, les salariés soumettent leurs souhaits à l’employeur en début d’année.
L’employeur peut décider de fermer l’entreprise et placer tous les salariés en congé aux mêmes dates ou bien d’accorder les congés par roulement.

Dans ce cas, pour définir l’ordre des départs, l’employeur doit tenir compte des critères suivants (C. trav., art. L3141-16) :

  • Situation de famille des bénéficiaires (notamment les possibilités de congé du conjoint ou du partenaire Pacsé, la présence au sein du foyer d'un enfant ou d'un adulte handicapé ou d'une personne âgée en perte d'autonomie) ;
  • Durée de service chez l'employeur;
  • Activité chez un ou plusieurs autres employeurs.

L’employeur informe individuellement chaque salarié de ses dates de départ en congés au plus tard un mois avant son départ.

4- Qu’est ce que le « fractionnement » des congés payés ?

Le congé principal peut être « fractionné », ce qui signifie que le salarié pose des jours entre le 1 er novembre et le 30 avril.
Ce fractionnement n’est possible qu’à la double condition que (C. trav., art. L3141-19) :
- l’employeur et le salarié donnent leur accord (nous recommandons de formaliser cet accord par écrit)
- et que le salarié prenne au minimum 12 jours consécutifs entre le 1er mai et le 31 octobre.
Les jours de fractionnement ouvrent automatiquement droit à des jours de congés supplémentaires (entre 1 et 2 maximum), sauf en cas de renonciation écrite par le salarié (C. trav., art. L3141-23).
Le fractionnement des congés payés peut offrir de nombreux avantages pour les salariés, notamment la possibilité de prendre des congés plus régulièrement tout au long de l'année, ce qui peut contribuer à un meilleur équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle.
Pour les employeurs, le fractionnement des congés payés peut également être bénéfique en permettant une meilleure planification des activités de l'entreprise tout au long de l'année.

5- Les congés non pris au 31 mai peuvent-ils être reportés sur les années suivantes ?

En principe, les jours non pris au 31 mai de chaque année sont définitivement perdus.
Par exception, les congés peuvent être reportés dans les cas suivants :

  • Commun accord entre employeur et le salarié ;
  • Usage dans l’entreprise ;
  • Absence pour maladie, accident du travail, maladie professionnelle, congé de maternité ou d'adoption ;
  • Annualisation du temps de travail : report d’une partie des congés jusqu’au 31 décembre de l’année suivante si l’accord le prévoit ;
  • Report dans la limite de 6 jours par an pour prise d’un congé sabbatique ou un congé pour création d’entreprise.

Le guide pratique qui précède ne dispensera toutefois pas les employeurs, notamment pris de doute, de se tourner vers leur conseil habituel pour s’assurer de leurs droits et obligations.
Car selon la taille de l’entreprise, la gestion du personnel est parfois un sujet chronophage et source d’inquiétudes, les employeurs ayant parfois l’impression de trop délaisser leur métier premier pour des tâches administratives techniques et pourtant incontournables.